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Avis 77/06

Avis 77/06 - Demande d'avis émanant d'un particulier

Conformément au règlement d’ordre intérieur de la Commission, deux membres, Madame Gevaert (en qualité de Directrice générale ad interim) et Monsieur Hannecart (en qualité de Directeur de l’aide à la jeunesse ayant eu à connaître de ce dossier) estiment ne pas pouvoir participer à l’audition et aux débats dans le présent dossier.

1. Recueil de la demande et procédure    

1.1. Par courrier daté du 26 avril 2006, Madame B. interpelle la Commission de déontologie, car elle estime ne pas bénéficier d’un traitement respectueux de la part d’un directeur de l’aide à la jeunesse.

Suite à l'entretien téléphonique avec MonsieurX  le 27/03/06, je vous sollicite, concernant un dossier au SPJ de W (... référence du dossier).

Je vous explique en quelques mots le subi de mes enfants et moi-même.

Mes enfants et moi-même ont dû subir l'agressivité de leur père et mon ex-mari maintenant, ainsi que celle de mes ex-beaux-parents. (Coups et blessures voir certificat médical au Parquet).

L'affaire s'est mise en route par l'école de R. et ensuite transférée au Parquet de W. qui transféra le dossier au SAJ de W. pour de l'aide. Ensuite, les enfants ont été placés par le SAJ à ZZZ pour 1 mois à partir du 25 mars 2004 jusqu'au 26 avril 2004. Puis, de nouveau retour au SAJ mais comme il n'y avait pas d'entente entre les parents, ils font alors appel au tribunal de la jeunesse.

Le tribunal de la jeunesse plaça les enfants 14 jours chez les grands-parents paternels renouvelables 60 jours. Quand les 60 jours sont terminés, nous voilà de retour au tribunal de la jeunesse avec le Directeur et ils décidèrent de placer les enfants en famille d'accueil, c'est-à-dire chez les grands-parents paternels pour une période de 1 an alors que le père de mes enfants habitait sous le même toit, ce que je ne comprenais pas.

Je ne comprends pas pourquoi avoir placé les enfants là-bas alors que l'assistante sociale avait fait un rapport du père, de la mère, des grands-parents paternels ainsi qu'à l'école de R. et la directrice disait que la grand-mère paternelle était battue depuis 35 ans, je ne sais pas pourquoi avoir placé des enfants dans une telle situation de violence et je ne comprends pas avoir été mise à l'écart.

Moi, je suis allée en appel contre la décision du Directeur à Y. J'ai même demandé de l'aide auprès de Monsieur Lelièvre (Délégué Général de la Communauté Française aux droits de l'enfant) où là je me sentais écoutée. On a vu qu'on dénigrait la mère et après analyse du dossier à Y. ainsi qu'une expertise, la cour d'appel décida de mettre les enfants en internat (prononcé du 14/09/2005). Le jour du prononcé, nous nous rendons chez le Directeur  mais le prononcé était en ma faveur et celui-ci dit « Madame, vous l'avez voulu ainsi, vous tirerez votre plan avec vos enfants. ») Quelle expression pour un directeur du SPJ. Ensuite, le Directeur invita le père pour aller chercher les enfants et les grands-parents (famille d'accueil) ainsi que l'avocat des enfants pour expliquer ce qui allait se passer mais aucune invitation ne me fut adressée alors que les parties concernées dans ce dossier devaient être présentes.

Dans le prononcé du 14/09/05, on dit de mettre en route une aide éducative parentale qui fut mise en service 3 mois après le prononcé. Ce service était le S.A.I.E. Mais dans ce dossier, le Directeur et son assistante sociale traitent ce dossier à mon sens avec un manque d'objectivité et d'impartialité quand nous nous rendons en réunion au SPJ, je ne suis jamais écoutée mais on tient toujours compte des dires du père et des grands-parents. Le Directeur a une expression très agressive envers moi et mon défenseur ainsi que mon médecin traitant qui pourrait témoigner puisqu'il suit cette affaire depuis longtemps dans l'intérêt des enfants. Le 04/01/06 dernier, l’assistante sociale et le S.A.I.E. se sont présentés à notre nouveau domicile à P. en vue d'une évaluation avec les enfants, moi-même et mon compagnon, celle-ci a dit en présence du S.A.I.E. que ce n'était pas l’idéal de vivre dans un appartement avec des enfants. A notre connaissance, le SPJ est tenu à ne pas intervenir dans la vie privée. Alors qu'on avait placé les enfants chez les ex-beaux-parents, sans faire une enquête sociale (hygiène) ou situation de vie.

Pendant les congés d'août de l'année passée du Directeur, j'ai eu l'occasion d'avoir des contacts avec un autre Directeur de l'aide à la jeunesse mais tout à fait autre et là on pouvait avoir un dialogue correct.

Je me sens jugée par le Directeur, je suis choquée par son langage souvent peu poli et autoritaire. Je ressens sa volonté d'imposer mais pas de construire.

Selon moi, le Directeur n'a pas supporté mon appel, d'être réformé par la Cour d'Appel, d'avoir été convoqué à plusieurs reprises devant la Cour d'Appel pour s'expliquer et qu'il y a des entretiens supplémentaires avec l'avocat des enfants et l'avocat du père en dehors de ma présence. A maintes reprises, j'ai pu constater que l'avocat représentant les enfants n'était pas présent aux réunions du SPJ alors que selon la déontologie, toutes les parties doivent être représentées. ­

Le but de ma démarche est de dire que je pensais qu'il devait y avoir un traitement respectueux des droits de chaque partie de la part du Directeur du SPJ ce qui n'est pas le cas.

Dans l'attente d'une réponse de votre part, veuillez agréer, ....

1.2. Ses récriminations sont confirmées par un courriel du 23 mai 2006 suite à une nouvelle réunion au SPJ le 18/05/2006.

Madame,

Comme suite à notre entretien téléphonique, je tenais de vous faire savoir le résultat de l'entretien avec le SPJ de W. (le directeur) et toutes les parties concernées le jeudi 18/05/06 à 16h00.

Le comportement du directeur est toujours le même envers moi-même et mon conseil. Je me sens traitée comme une accusée et ne bénéficie pas d'une écoute.

Ne devrait-il pas faire rapport après chaque réunion pour toutes les parties?

Ne devrait-il pas mettre aussi par écrit, le suivi psychologique pour le garçon ainsi que mandaté le S.A.I.E. (Service d'Intervention Educative en Famille) ?

Le directeur m'a aussi dit avec agressivité, si je voulais que les enfants soient placés jusqu'à leurs 18 ans en institution ou la garde chez le père.            

Mais pour moi, comme pour mon conseil, la seule solution pour l'instant est de laisser les enfants dans un milieu neutre hors du milieu familial avec un retour chez moi-même ainsi que leur père alternativement.

Merci et reste à votre entière disposition.

Mme B.       

1.3. Lors de son audition par la Commission le 11 septembre 2006, Madame B. étaye son argumentation et dépose une série de documents retraçant les différentes décisions prises respectivement par la cour d’appel, par le directeur de l’aide à la jeunesse et par le tribunal de première instance, de même que copie de deux courriers adressés par son avocat au « directeur du SPJ ».

Lors ce cette audition, Madame B. confirmera qu’il n’existe aucun litige pendant faisant l’objet d’une procédure juridictionnelle ou administrative.

Le directeur de l’aide à la jeunesse n’a pour sa part pas répondu à l’invitation d’être auditionné par la Commission.

2. Compétence de la Commission             

Avant toute chose, la Commission tient à rappeler qu’elle n’est ni un tribunal, ni une chambre de recours. En sa qualité d’organe consultatif, elle n’a ni la capacité d’instruire un dossier autrement que par l’examen des pièces déposées et par l’audition volontaire des parties concernées.

Elle n’est non plus compétente pour prononcer des sanctions disciplinaires ou autres à charge de personnes sur base de plaintes qui lui seraient soumises (cfr. avis 09/1999). Sa mission consiste donc à apprécier si les pratiques exposées sont ou non conformes au code de déontologie, et non à déterminer si une personne est ou non coupable d’une faute.

Dans le cas présent, sur base de l’article 4 bis modifié du décret du 04 mars 1991 relatif à l’aide à la jeunesse, compte tenu des seuls éléments portés à sa connaissance, parmi lesquels l’absence de procédure judiciaire ou administrative pendante, la Commission s’estime compétente pour remettre un avis général sur ce qui, dans les faits ou comportements dénoncés par la partie demanderesse, s’ils étaient avérés, constituerait ou non des manquements au code de déontologie.

3.  Auditions

3.1.      La Commission regrette que le directeur de l’aide à la jeunesse dont les attitudes sont dénoncées par la demanderesse n’ait répondu d’aucune manière à l’invitation d’être auditionné.

S'agissant d'un acteur qui représente officiellement la Communauté française auprès de personnes requérant une aide, fût-elle contrainte, une attitude responsable et digne de cette fonction eut été indiquée.         

            La Commission assume une mission d’intérêt public de nature à renforcer la qualité du travail des intervenants et l’aide accordée aux bénéficiaires. A ce titre, elle participe à l’aide à la jeunesse et est d’avis que l’article 6 du code de déontologie trouve à s’appliquer dans les relations des intervenants avec la Commission. Cet article énonce notamment que « Les intervenants ont l'obligation, dans les limites du mandat de l'usager, du respect de la loi et du secret professionnel, de travailler en collaboration avec toute personne ou service appelé à traiter une même situation (…)».

La collaboration loyale avec la Commission relève donc elle aussi d’un devoir déontologique ; les membres de la Commission étant eux aussi soumis au code de déontologie et couverts par le secret professionnel (cfr. avis 13/1999).

La Commission rappelle à cet effet que toute personne qui participe activement aux auditions le fait en qualité de témoin et jamais en tant que personne mise en cause, même si elle est l’auteur de la pratique qui fait l’objet de la demande (cfr. avis 13/1999).

3.2. La Commission a entendu Madame B. en présence de son compagnon en date du 11 septembre 2006, soit après l’extinction de toutes procédures judiciaires.

    3.2.1. Quant aux mesures prises       

Madame B. est mère de deux enfants et est séparée de leur père.

En décembre 2004, estimant établi l’état de danger des enfants compte tenu du conflit parental persistant, le tribunal de la jeunesse décide de leur hébergement temporaire en dehors de leur milieu familial.

En application de ce jugement, le directeur de l’aide à la jeunesse place les enfants en famille d’accueil, en réalité chez leurs grands-parents paternels, là où précisément habite leur père également.

Estimant ce lieu d’accueil partial, Madame B. introduit un recours devant le tribunal de la jeunesse, ensuite devant la cour d’appel qui, réformant la décision du directeur, décide du placement des enfants en milieu neutre, étranger au conflit parental. En septembre 2005, les enfants sont ainsi placés en internat scolaire.

En juillet 2006, le tribunal de la jeunesse renouvelle la mesure d’éloignement hors du milieu familial. En application de ce jugement, en septembre 2006, le directeur de l’aide à la jeunesse décide du placement des enfants chez leur père, avec l’accord verbal de leur mère, et fixe pour celle-ci un droit aux relations personnelles. Cette décision est valable jusqu’à la prochaine évaluation fixée quatre mois plus tard. De ce fait, selon Madame B., elle ne peut faire l’objet d’un recours.

Le 26 septembre, le directeur suspend tout retour des enfants chez leur mère compte tenu d’événements survenus lors du week-end précédent.

Madame B. dit ne pas comprendre pourquoi ses enfants sont placés dans un milieu non neutre, à l’encontre de la décision du tribunal.  Elle ne comprend pas que le directeur de l’aide à la jeunesse puisse changer comme cela les décisions du tribunal. 

Madame B. conteste la validité de l’accord qu’elle aurait donné quant au placement des enfants chez leur père en septembre 2006. Elle y aurait de fait consenti, le couteau sous la gorge, après un répit de 24 heures, mais n’aurait signé aucun document (sic).

Madame B. dénonce également le fait que toutes les parties concernées ne soient pas systématiquement invitées aux réunions au SPJ.  Parfois, elle ne reçoit pas d’invitation lorsqu’une réunion se tient en présence du père et des grands-parents des enfants. Parfois, c’est l’avocat des enfants qui n’est pas présent. Elle conteste par ailleurs que toutes les réunions ne fassent pas systématiquement l’objet d’un rapport adressé à toutes les parties concernées.

Madame B. déplore que son dossier soit traité par le directeur et par la déléguée du SPJ avec un tel manquement d’objectivité et d’impartialité. Elle ne se sent pas sur le même pied d’égalité que le père des enfants, évoquant un déséquilibre flagrant. Ainsi, même son avocat ne reçoit aucune réponse à ses courriers, pas même un accusé de réception.

Il apparaît par ailleurs que Madame B. ignore les raisons qui rendraient inattaquables, selon elle, par voie de recours, la dernière décision du directeur.

   3.2.2.. Quant aux attitudes du directeur de l’aide à la jeunesse

Madame B. déplore certains propos tenus par le directeur à son encontre. Elle se dit choquée par son langage, son impolitesse et son expression très agressive, comme par exemple « vous l’avez voulu comme ça, maintenant tirez votre plan avec vos enfants ! ». 

Madame B. se sent toujours mise en accusation, jugée ; elle ne se sent pas respectée comme mère, ni comme personne.

Elle ressent « la volonté du directeur d’imposer, mais pas de construire ».

Madame B. se dit persuadée qu’il existe un lien suspicieux entre le directeur de l’aide à la jeunesse et l’avocat des enfants ; leurs propos étant par ailleurs absolument identiques.

Selon Madame B., le directeur n’a pas apprécié qu’elle ait interjeté appel et que la décision ait été réformée. « Il a été de plus en plus agressif quand il s’est rendu compte que j’étais allée en recours » dira-t-elle.  De même, celui-ci lui aurait ironisé sur le fait qu’elle se soit adressée à la Commission de déontologie.

 

4. Avis de la Commission

4.1. Quant aux mesures prises

Parmi les griefs énoncés par Madame B. à propos des décisions prises par le directeur, la Commission ne retiendra que ceux qui s’appuient sur des faits tangibles. Elle estime toutefois ne pas avoir à se prononcer sur ce qui relève directement du respect des règles de droit (notamment les modalités de recours), ni sur ce qui est de l’ordre de l’appréciation de la méthodologie développée dans ce SPJ (par exemples, convocation distincte ou conjointe des personnes concernées, absence de l’envoi systématique d’un rapport de réunion, etc.).

En ces matières, la Commission n’a pas à se substituer au conseil de Madame B. et à rappeler les règles de procédure. De même, elle entend préserver la liberté méthodologique de chaque service d’adapter ses modalités à chaque cas d’espèce, pour autant bien entendu que celles-ci s’inscrivent dans une conformité suffisante avec les droits fondamentaux reconnus aux individus et aux familles. (cfr. avis 47/2003)

Ceci étant, la Commission considère opportun de préciser qu’un directeur de l’aide à la jeunesse, même s’il n’est pas soumis à l’autorité judiciaire, ne peut outrepasser le mandat qui lui est donné. A défaut, il sort de son rôle soit en s'attribuant un pouvoir qu'il n'a pas légalement, soit en opérant une confusion des rôles.


En l'espèce, le directeur de l'aide à la jeunesse n'avait légalement pas le pouvoir d'ordonner, sans l'accord des bénéficiaires de l'aide, des modalités de mise en œuvre d'une mesure décidée par jugement contradictoires avec le principe de la mesure décidée par l'autorité judiciaire. Cette pratique revient à vider le jugement de sa substance par un excès de pouvoir.

Certes, un directeur de l’aide à la jeunesse a pour missions, entre autres, de préserver la cohésion familiale et de tendre vers un retour à l’aide volontaire. Il doit toutefois également respecter les décisions judiciaires qu'il doit mettre en œuvre. Il ne peut s'en écarter qu'en réunissant l'accord de toutes les parties dans le respect des conditions prévues à l'article 7 du décret de la Communauté française du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse. Cet accord doit être soumis à l'homologation du tribunal de la jeunesse.

En l'espèce, selon Madame B., il semble qu'aucune de ces conditions n'a été remplie si accord il y a eu. D'un côté, il n'y a pas eu d'accord écrit. De l'autre, il n'y a pas eu de demande d'homologation au tribunal de la jeunesse.

Les arrêts du 7 juin 2000 et du 1er avril 2004 de la cour d’appel de Liège confirment ces principes : « si le directeur doit pouvoir bénéficier d’une liberté d’action et d’appréciation compte tenu notamment de l’évolution de la situation, il n’a pas qualité, comme autorité administrative, pour revoir d’emblée, sans essai préalable, le principe de la décision judiciaire et la priver d’objet, autrement que par le retour de la situation dans la sphère de l’aide au moyen de l’introduction d’une demande d’homologation d’accord, conformément à l’article  38§4 à 12 du décret ».

Si ces principes n’étaient pas respectés par un directeur de l’aide à la jeunesse, la Commission devrait considérer qu’il y a un manquement par rapport à l’article 6 du code de déontologie qui stipule que « Les intervenants ont l’obligation dans les limites du mandat de l’usager, du respect de la loi et du secret professionnel, de travailler en collaboration avec toute personne ou service appelé à traiter une même situation. ….La collaboration entre les services suppose la délimitation et le respect du rôle et des compétences de chacun des acteurs, ainsi qu’un échange d’informations… ».[1]

En outre, plusieurs éléments semblent, en l'espèce, avoir contribué à susciter l’incompréhension chez la bénéficiaire de l'aide, Madame B, quant au sens des décisions prises. Cette incompréhension est sans doute née en raison du caractère contradictoire des mesures ordonnées par l'autorité judiciaire et le directeur de l'aide à la jeunesse. Madame B. ne semble également pas avoir reçu toute l'information de la part du directeur de l'aide à la jeunesse qu'elle était en droit d'avoir sur la base de l'article 5 du décret de la Communauté française du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse, et notamment une information complète sur les recours et leurs effets. 

Cette double hypothèse laisserait à penser que l’article 8 du code de déontologie n’aurait pas guidé le décideur, lequel doit « s’assurer que le bénéficiaire ou ses représentants apprécient en pleine connaissance de cause la nécessité, la nature et la finalité de l’aide ainsi que ses conséquences et puissent dès lors faire valoir leurs droits. Il est tenu de formuler ses propositions et décisions relatives à cette aide dans un langage compréhensible et lisible énonçant… les considérations de droit et de fait qui les fondent. Ces propositions et décisions ainsi motivées doivent être notifiées aux personnes intéressées par l’aide et qui sont autorisées à introduire le recours prévu à l’article 37 du décret … ».

La Commission rappelle ici que le droit de recours est un droit absolu qui reconnaît le bénéficiaire de l’aide dans son individualité. Il permet d’initier une conciliation et ne s’apparente pas à un rapport de force, d’autant que la mise en application du résultat de l’action judiciaire reste du ressort de l’autorité administrative dont la décision est contestée. Il convient donc de penser le recours dans une dynamique constructive. Ignorer ce principe légalement consacré reviendrait à bafouer l’article 2 du code de déontologie qui dispose que «le bénéficiaire doit rester sujet de l’intervention ».

La Commission estime ne pas avoir à se prononcer sur le fond des mesures prises. Elle se contente de rappeler les principes élémentaires présidant à toute prise de décision selon lesquels « l’intervenant recherche les solutions les plus épanouissantes pour le bénéficiaire … et veille à proposer la solution qui a la meilleure chance de succès… » (article 2 du code de déontologie). L’application de ces préceptes fait évidemment appel à l’esprit critique de l’autorité eu égard à la situation qu’il a à traiter et au recueil de l’avis de chacune des parties intéressées. Son action reste guidée par la prise en compte maximale de l’intérêt de l’enfant.

Dans l’exposé de la présente situation, il apparaît regrettable aux yeux de la Commission que les professionnels n'aient pas perçu que Madame B. les ressentait comme partiaux et qu'ils ne semblent pas avoir pris spécifiquement cette question en considération pour la traiter dans la mesure où elle rendait sans doute difficile toute autre intervention au bénéfice de l'enfant.

4.2. Quant aux attitudes du directeur de l’aide à la jeunesse

La Commission est d’avis que les récriminations énoncées par Madame B., si elles étaient vérifiées, constitueraient un manquement sévère à l’article 5 du code de déontologie.

Tout intervenant doit s’abstenir, par ses attitudes ou ses propos, de nuire inutilement et gravement à la crédibilité de sa fonction auprès des bénéficiaires de l’aide. Cette aide, fût-elle contrainte, repose avant tout sur la qualité de la relation établie avec ces derniers et sur la faculté du professionnel d’agir en conscience et avec esprit critique. Ce sont ces mêmes qualités qui doivent commander l’intervenant à rechercher une voie pacificatrice pour sortir de ce qui pourrait apparaître comme un conflit de personnes.

Le directeur doit donc s’efforcer de maintenir une qualité de relations qui lui permette de respecter tant les règles déontologiques que les principes généraux du décret du 04 mars 1991 relatif à l’aide à la jeunesse, dont celui de la déjudiciarisation qui suppose un dialogue constructif avec les bénéficiaires de l’aide.

Le code n’en ignore pas moins, en son article 15, la responsabilité du pouvoir organisateur (dans le cas présent, la direction générale de l’aide à la jeunesse) qui doit « s’assurer que le comportement des personnes qu’il occupe n’est pas de nature à être préjudiciable aux bénéficiaires de l’aide qui leur sont confiés » ; cette obligation de vigilance courrant tout au long de l’engagement des personnes visées.

 

5. Conclusion

Quelles que soient les responsabilités des uns et des autres dans cette situation, elle est regrettable et doit interpeller les professionnels. La Commission est d'avis qu'une juste application des règles de déontologie est un instrument parmi d'autres qui peut contribuer, d'une part, à analyser de ce qui a conduit à ce résultat et, d'autre part, à rechercher les moyens d'y remédier et de l'éviter à l'avenir.

La Commission conclut que les doléances présentées par Madame B. sont potentiellement susceptibles de révéler des manquements graves au code de déontologie.

L’absence de collaboration du directeur incriminé par Madame B. aux travaux de la Commission est également regrettable.

La Commission ne peut que rappeler l’obligation pour chaque intervenant de remettre en question régulièrement ses pratiques professionnelles (article 4 du code) et en réfère à l’autorité hiérarchique pour mener, si elle l’estime opportun, les investigations nécessaires.


[1] in « Enfants maltraités, jeunes en danger : entre social et judiciaire ». P.55 sous la direction de M. Poncelet, F. Misson et P. Hannecart. Collection Détournement de fond.

Couleurs livres asbl, 2005

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