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Aide à la jeunesse

Avis 51/03

Demande d'avis
de la Directrice générale
de l'aide à la jeunesse

La Commission de déontologie est saisie d'une demande introduite par courrier du 14 janvier 2003 de la Directrice générale de l'aide à la jeunesse, suite à une note établie par Monsieur l'Inspecteur D. relative à un C.O.E. "R".

La note de Monsieur l'Inspecteur D. a été rédigée suite à son rapport d'inspection du 25 octobre 2002. Elle est rédigée comme suit

"Lors d'une visite d'inspection, j'ai été informé d'une situation de travail qui me pose question. Ce service a reçu un mandat du S.P.J. pour intervenir dans une famille en difficulté où l'on trouve une maman et ses quatre enfants. Dans le déroulement du travail de type familial, des difficultés ont subsisté et le placement, étalé dans le temps, de trois enfants est intervenu, dont celui de M..
Quelques mois après ce placement, la directrice du COE, au cours d'une visite en famille a appris qu'un membre de son équipe suivait en clientèle privée M; celle-ci, dans le cadre de son placement, bénéficiait donc d'une psychothérapie.
Au sein de l'équipe du COE, l'opinion de tous les intervenants a été de dire que ce n'est pas possible d'intervenir comme thérapeute privé auprès d'une jeune que l'on a connue dans le cadre d'un mandat S.P.J.
Dans la discussion interne au service, Madame S. s'est insurgée contre cette opinion et a trouvé inadmissible que ses collègues se mêlent de sa clientèle privée.
Je m'interroge aussi sur cette pratique qui me semble inadmissible.
N'y-a-t-il pas risque qu'une personne, qui a une double fonction (intervenant dans un COE et thérapeute privé), utilise des informations obtenues dans le cadre de son travail au sein du service COE pour "aider" son travail en clientèle privée?"

La directrice générale de l'aide à la jeunesse demande de connaître l'avis de la Commission quant à la conformité au Code de déontologie, notamment avec l'article 13, de la pratique dénoncée par l'inspection?

La Commission a demandé via l'administration d'obtenir la copie de la totalité du rapport d'inspection relatif à cette situation. Ce document lui a été fourni.

Il ressort de ce rapport les éléments suivant:

- Le R. s'est vu confié la situation par le S.P.J. Au début un travail familial est entamé par deux intervenants, Madame L. et Monsieur N.. Par la suite, le R. a proposé et mis en place des suivis individuels. Madame Q. a suivi R. et Madame S., psychothérapeute mise en cause, a suivi M.

- Plus tard, trois des quatre enfants, dont M., vont faire l'objet d'un placement dans le même service résidentiel.

- Le directeur du service résidentiel, interrogé par l'Inspecteur, a précisé que c'est son équipe qui a proposé à l'autorité mandante l'intervention de Madame S. lorsqu'il s'est avéré qu'une psychothérapie était nécessaire pour M.. L'équipe avait, en effet, été très satisfaite du suivi assuré par Madame S. pour un autre jeune placé dans l'institution.
Le directeur du service résidentiel se souvient que lorsqu'on a évoqué cette proposition au S.P.J., le délégué a soulevé la question d'un éventuel problème de déontologie.
La thérapie a commencé le 11 septembre 2001. Lorsqu'elle a entamé son travail, Madame S. a fourni les documents habituellement demandés, à savoir une copie de son diplôme et une déclaration attestant qu'elle n'était pas rétribuée par un autre service public pour ce travail.
En septembre - octobre 2001, lors d'une visite effectuée auprès de la maman, Madame Q. a rencontré M. qui était placée et elle a appris qu'elle faisait l'objet d'un suivi par Madame S..

- La discussion relative à ce suivi en privé aura lieu en équipe au COE le 8 mai 2002.

Par courrier du 16 avril 2003, la Commission a signalé au COE et à la psychothérapeute mise en cause qu'elle était saisie du cas en les invitant à faire connaître leurs observations s'ils le souhaitaient.

Par courrier du 30 mai 2003, Madame S., la psychothérapeute mise en cause, a fait savoir ce qui suit:

"J'ai reçu ce 28 mai, de l'ASBL R. où je ne travaille plus depuis un an, la copie d'un courrier que vous lui avez adressé le 16 avril.
Je crois savoir à quelle situation vous y faites allusion quand vous évoquez l'enfant M. Sachez que le COE. n'avait plus de mandat d'intervention lors de sa prise en charge thérapeutique".

Par courrier du 6 juin 2003, le COE a fait connaître la réflexion de son équipe:

"Tout d'abord nous sollicitons votre avis sur la pratique d'utiliser des informations obtenues sur les usagers dans le cadre d'une guidance sous mandat judiciaire et subsidiée par la Communauté française, ensuite dans le cadre d'une pratique privée. Il nous serait apparu plus envisageable de consulter l'équipe quant à une demande de suivi individuel hors du milieu familial. Ainsi nous aurions pu débattre d'une solution telle que formuler au mandant la demande d'un "double mandat".
Par ailleurs, nous nous interrogeons sur la retenue de l'intervenante vis-à-vis de l'équipe quant à son travail auprès de l'enfant et de ses perspectives. En effet, il restait d'actualité un mandat d'accompagnement éducatif de notre centre d'orientation éducatif pour deux autres enfants encore hébergés en famille. Ainsi, trois intervenants dont la psychothérapeute poursuivaient un suivi auprès des parents et deux enfants.
Cette question nous paraît d'autant plus importante que notre projet pédagogique s'appuie essentiellement sur un travail d'équipe. Pratiquement, nous multiplions par deux voire par trois les intervenants qui rencontrent les familles. Par ailleurs, une fois par semaine, nous nous réunissons afin de soutenir, d'alimenter la réflexion sur les familles, leur problématique et à déterminer les orientations et les méthodologies d'intervention. Le but est de réapproprier et de responsabiliser chaque membre de l'équipe dans chaque situation. Nous bénéficions également de supervisions externes d'équipe une fois par mois".

Des informations dont dispose la Commission, il apparaît que:

Le suivi de M. par le COE a pris fin lors de son placement. Pendant le suivi de M. par Madame S. en clientèle privée, le COE assurait encore le suivi de la maman et de deux autres enfants qui vivaient avec elle.

L'article 13, al. le' du Code déontologie dispose que "l'intervenant ne peut exercer à l'égard d'un même bénéficiaire de l'aide plusieurs fonctions liées à l'octroi, au refus d'octroi, ou à la mise en œuvre de l'aide".

La Commission considère que les termes "plusieurs fonctions" utilisés dans cette disposition ne signifient pas nécessairement que l'intervenant doit exercer différentes qualités professionnelles ou autres (p. ex. mandat dans le P.O. d'un service, etc.). L'intervenant peut également exercer plusieurs fonctions tout en mettant en œuvre une seule et même qualification professionnelle.

En l'espèce, sur la base de sa seule formation de psychothérapeute, Madame S. exerçait une activité au sein du C.O.E. et de la psychothérapie en clientèle privée. Ces deux activités sont loin d'être identiques ou similaires. Ces différences apparaissent très clairement en matière de secret professionnel. En vertu de l'article 3, al. 3 de l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 15 mars 1999 relatif aux conditions particulières d'agrément et d'octroi des subventions pour les centres d'orientation éducative, le C.O.E. est tenu de transmettre régulièrement à l'autorité mandante des rapports concernant le contenu de l'intervention. Dans ses conditions, le C.O.E. ne peut donc pas faire de la thérapie qui exige de garantir une confidentialité stricte au client. A l'inverse, le psychothérapeute privé est tenu au secret professionnel à l'égard de l'autorité qui intervient à l'égard du jeune.

Dans ces conditions, la Commission est d'avis qu'il est contraire à l'article 13, al. 1er du Code de déontologie pour un intervenant de simultanément suivre un jeune au sein d'un C.O.E. et d'assurer à son égard une thérapie en clientèle privée.

Tel n'était cependant pas le cas dans l'espèce soumise à la Commission. En effet, l'enfant M. ne faisait plus l'objet d'un suivi par le C.O.E. au moment où Madame S. l'a reçue en clientèle privée. Par contre, la mère et deux autres enfants étaient encore pris en charge par le C.O.E.

Dans la mesure où la situation familiale, à travers le cas de le mère et des deux autres enfants, était évoqué dans les réunions d'équipe auxquelles participait Madame S., celle-ci était susceptible, d'une part, d'avoir connaissance d'éléments relatifs à M. qu'elle n'aurait peut-être pas appris par la seule consultation privée et, d'autre part, de révéler à l'équipe des éléments appris en consultation privée, et ce soit directement soit indirectement, par exemple, en orientant des analyses de la situation.

Dans ces conditions, la Commission est d'avis que Madame S. a violé l'article 13, al. 1er du Code de déontologie et a exercé deux fonctions différentes à l'égard de Michèle d'autant qu'elle avait à la fois une intervention à l'égard de sa seule personne et à l'égard de son milieu familial.

La Commission tient à préciser qu'elle est d'avis que, si dans tous les cas l'article 13 du Code de déontologie interdit d'exercer simultanément deux fonctions différentes à l'égard d'un bénéficiaire, il n'empêche toutefois pas, dans certains cas, qu'un même intervenant exerce successivement deux fonctions différentes à l'égard d'un bénéficiaire pour autant que la situation ne viole pas une disposition légale ou une autre règne de déontologie.

A titre d'exemple, la Commission est d'avis que si le COE n'avait plus eu de mandat à l'égard de certains membres de la famille, Madame S. aurait pu éventuellement recevoir M. en consultation privée. La Commission souligne toutefois qu'il faut toujours apprécier ce type de situation avec une extrême prudence et vérifier que de telles interventions successives à des titres différents sont dans l'intérêt réel du bénéficiaire.

Toujours à titre d'exemple, la Commission est d'avis qu'il ne paraît pas concevable qu'un psychothérapeute qui a reçu un patient en clientèle privée intervienne, par la suite, à son égard dans le cadre d'un C.O.E. En effet, dans ce cas, il existerait un risque structurel de violer le secret professionnel puisque l'intervenant serait tenu de faire des rapports à l'autorité mandante sur la personne de son ancien patient.

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