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Aide à la jeunesse

Avis 44/02

Demande d'avis
d'un Service de Protection Judiciaire

Demande

Par lettre du 1er mars 2002 envoyée à la Commission de déontologie, les déléguées en chef et les délégués d'un Service de Protection Judiciaire

- exposent que " l'article 11 du décret relatif à l'aide à la jeunesse fait l'obligation aux conseillers et directeurs de mettre à la disposition des personnes intéressées visées à l'article 1, 1° à 5° ainsi qu'à leurs avocats toutes les pièces du dossier d'un jeune ouvert au SAJ ou au SPJ, à l'exception des pièces portant mention ‘ confidentiel ‘ communiquées par les autorités judiciaires et, pour les personnes intéressées, des rapports médico-psychologiques " ;

- estiment qu' " il est clair que ce faisant on met à la disposition de personnes extrêmement nombreuses des documents dont le contenu peut être très ‘ sensible ‘. Que ce soient des courriers et rapports d'intervenants extérieurs (institutions de placement, ou autres, thérapeutes qui n'émettent pas de rapports médico-psychologiques ou des rapports des gradués). Toutes ces personnes sont par ailleurs liées par le secret professionnel et notamment en application de l'article 7 de l'arrêté du gouvernement de la Communauté Française du 15 mai 1997 créant le code de déontologie des services du secteur de l'Aide à la Jeunesse ";

- disent qu'il leur " paraît que ces dispositions peuvent dans certains cas entrer en contradiction. En effet, les travaux préparatoires du décret, dans les commentaires des articles, définissent la famille sur base des liens juridiques créés par la filiation et visent les ascendants, c' est à dire, dit le texte, les parents et les grands-parents. Et par ailleurs, la définition des familiers fait référence à des liens sociologiques et affectifs. Il s'agit ‘ des personnes qui composent l'entourage humain habituel du jeune sans avoir nécessairement des liens juridiques avec lui '. Il s'agit donc d'une population extrêmement large, au sein de laquelle il n'est pas rare dans les faits de rencontrer des gens dont les intérêts peuvent s'avérer divergents de ceux du jeune. Il peut s'agir par exemple, d'un grand-père soupçonné d'attouchements sur sa petite fille, ce qui a nécessité un éloignement de celle-ci de ce milieu. Les intervenants peuvent faire état dans leurs rapports de dénonciations ou de propos négatifs concernant cette personne, émanant de l'entourage familial ou amical, ou du voisinage. Dès lors mettre ces documents en possession du grand-père concerné peut conduire celui-ci à prendre des mesures de rétorsion contre ces personnes qui pourraient à leur tour reprocher aux intervenants et au gradué d'avoir violé le secret professionnel. ";

- pensent que " pour éviter ces critiques, les intervenants n'auraient d'autre solution que la rétention d'information et l'autocensure. Au risque dès lors que le conseiller, le directeur et, dans le cadre d'application de l'article 38 du décret relatif à l'Aide à la jeunesse ou l'article 36.4 de la loi sur la protection de la jeunesse, le juge ne soient pas correctement informés des différents paramètres de la situation du jeune concerné. Au risque, bien évidemment, de provoquer dans leur chef des erreurs graves d'appréciation et de conduire à des décisions inappropriées. ";

- considèrent qu'il existe donc " un conflit entre deux normes juridiques équipollentes (article 458 du code pénal et article 11 du décret de la Communauté Française relatif à l'Aide à la jeunesse) ainsi qu'entre le décret et le code de déontologie "

et souhaitent que la commission de déontologie exprime son avis à cet égard

LA COMMISSION,

- rappelle que l'article 458 du Code pénal crée, dans le chef des intervenants, une obligation pénalement sanctionnée de respecter le secret professionnel tandis que l'article 11 du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse crée, dans le chef des bénéficiaires de l'aide, un droit d'accéder aux dossiers administratifs qui les concernent;

- considère qu'il n'existe pas de conflit de normes entre l'article 458 du Code pénal et l'article 11 du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse, les finalités de ces dispositions étant différentes mais compatibles;

- rappelle également que la volonté du législateur communautaire, en édictant l'article 11 précité, a été de conférer un caractère contradictoire aux débats relatifs à l'octroi, au refus et aux modalités de l'aide à la jeunesse;

- considère qu'il ne saurait être reproché aux intervenants une quelconque violation du secret professionnel au motif qu'ils consignent dans le dossier les éléments portés à leur connaissance puisque les bénéficiaires de l'aide savent que ce qu'ils exposent sera mentionné dans le dossier dont l'accès est réglementé par le décret;

- considère qu'en tout état de cause les intervenants ne peuvent pratiquer ni la " rétention d'informations ", ni l' " autocensure ": ils ne peuvent, sous peine de faillir à leur mission et de commettre ainsi une faute professionnelle grave, rien celer des éléments qu'ils apprennent à l'occasion de l'exercice de leur fonction mais, sachant que le dossier pourra être consulté, ils doivent faire preuve de prudence, rigueur et circonspection dans la rédaction des documents qui feront partie du dossier en prenant le soin de vérifier les informations qui leur sont données et en faisant la part des choses entre les rumeurs et les données objectives;

- rappelle enfin que l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 27 juillet 1998 fixant les modalités de la consultation des pièces du dossier du conseiller ou du directeur de l'aide à la jeunesse contient des dispositions protectrice des droits des bénéficiaires de l'aide en prévoyant notamment que, lors de la communication des pièces, le conseiller, le directeur ou l'agent de son service délégué à cette fin, fournit à la personne qui a demandé la consultation du dossier les explications et commentaires nécessaires et que toute copie des pièces du dossier mentionne que le document copié ne peut être communiqué aux personnes intéressées que dans le respect des dispositions de l'article 11, al. 2 du décret du 4 mars 1991 et ne peut être utilisé dans aucune autre procédure que celle relative à la mesure d'aide qui fait l'objet du dossier dont il est extrait.

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